Richard Rancourt

Nicaragua
2014

Depuis quelques années, j’avais le goût de faire du bénévolat dans d’autres pays. L’occasion m’en a été donnée en 2014 lorsque j’ai entendu parler de SOLIDARITÉ SUD. Quoique parlant un peu l’espagnol, je ne savais aucunement dans quoi je m’aventurais. L’immersion nous donne un électro choc. L’expérience a été très enrichissante. J’ai pu aider des gens qui en ont besoin et j’ai pu améliorer mon espagnol.

J’ai travaillé pendant deux mois dans un centre pour enfants handicapés comme homme à tout faire. J’ai dû faire de la menuiserie, de la plomberie, de la peinture et même de l’électricité. C’est souvent avec les moyens du bord qu’il fallait se débrouiller alors il m’a fallu me creuser les méninges pour arriver à faire chaque tâche. Il faut comprendre que les personnes en charge à cette école ont des moyens très limités et que chaque petite chose prend des airs de montagne à franchir. L’outillage est désuet quand il ne manque tout simplement pas mais j’ai vu comment, avec le peu qu’ils ont, ils peuvent se débrouiller et faire des miracles.

Je me souviens qu’une des femmes qui travaillait au Centre préparait les fruits pour la collation du matin et elle pelait les oranges avec un couteau dont on ne se serait jamais servi ici tellement il était émoussé et de plus le manche était cassé. Je me suis offert pour l’aiguiser et le rafistoler et quand je le lui ai rapporté (arrangé comme j’ai pu avec un clou scié et du ruban électrique), elle l’a repris avec un large sourire comme si je lui donnais tout un cadeau. La semaine suivante je suis allé au marché et je lui en ai acheté un tout neuf. Elle était plus que contente, mais elle a gardé précieusement le vieux couteau juste au cas. Et les jours suivants, elle me préparait une orange spécialement pour moi et me l’apportait à l’atelier.

Les gens du Centre sont très chaleureux et, après moins d’une semaine, tous me saluaient en me voyant arriver et même les enfants venaient me voir à l’atelier de menuiserie juste pour me voir travailler. Quand c’était le cours de menuiserie je pouvais apprendre avec eux le nom des outils et je devenais leur complice quand ils cherchaient une réponse.

La directrice du Centre m’a dit un jour qu’elle aimerait bien avoir un petit jardin pour apprendre aux élèves à cultiver les légumes et entretenir un jardin ; alors je me suis mis à fabriquer trois rectangles de trois pieds sur dix pieds avec du bambou et de la broche et d’environ douze pouces de haut parce qu’il était à peu près impossible de creuser le sol trop sec et dur dans la cour de l’école. Ils ont ensuite apporté de la terre meuble et ils ont planté quelques légumes. J’ai reçu plus d’un courriel du professeur de menuiserie pour me dire comment ils ont apprécié ce jardin et que tous en prenaient soin et l’arrosaient à leur tour.

La dernière semaine de mon séjour, j’avais fait à peu près tout ce qu’ils avaient prévu me demander et un peu plus alors je n’avais rien à faire. Je me suis donc mis en tête de leur fabriquer des jeux de poches. Tous ici connaissent ce jeu où on lance des poches de sable dans des trous pour faire le plus de points possibles mais à Boaco ils n’avaient jamais vu ça alors j’ai fait fureur avec mon jeu et les enfants s’en sont donné à cœur-joie pendant les pauses. J’ai même eu le temps d’en faire pour les aînés du village qui ont bien apprécié.

Je me suis rendu compte assez tôt qu’il n’y a pas de petits gestes aux yeux de ceux qu’on veut aider. L’important c’est d’être à l’écoute pour comprendre leurs besoins. Et même si parfois on a l’impression qu’on aurait pu en faire plus pendant notre stage, il faut penser que ce qui a été fait n’aurait peut-être jamais été réalisé. Le plus gratifiant c’est de voir jusqu’à quel point on est apprécié, pas pour ce qu’on aurait pu faire de plus mais pour ce qu’on a fait. La fête que les professeurs et les élèves m’ont préparée valait plus que n’importe quel salaire que j’aurais pu tirer de ces deux mois de bénévolat. Ils ont passé au minimum trois heures à préparer une énorme salade de fruits, des pancartes pour les remerciements, différents cadeaux et un diplôme de reconnaissance. C’était touchant et tous les professeurs y ont participé. Le chauffeur a même fait un détour pour venir me saluer quand je suis parti pour revenir au Canada.

Il va sans dire que de faire partie d’un groupe de personnes dévouées comme j’en ai connues à Boaco apporte beaucoup du côté humain. Ça nous apprend à connaître nos limites d’adaptation face à un groupe. Se retrouver le midi ou le soir au souper pour partager nos expériences de la journée devient une nécessité après un certain temps. C’est comme de se retrouver en famille. Après cette expérience de bénévolat, je réalise de plus en plus que je suis choyé par la vie et pouvoir en redonner un peu m’a fait du bien. Je suis conscient de mes limites mais j’ai vu ce que la force d’action d’un groupe organisé peut accomplir sur le terrain.

En terminant, je me dois de saluer toutes les personnes responsables du stage et les féliciter de leur dévouement et de leur patience. Je me promets de revivre l’expérience dans un futur rapproché.